Design

Dorothée Meilichzon, L’art et la matière

Dorothée Meilichzon fait partie du club resserré des architectes d’intérieur en vogue, recherchée pour son art de mettre en formes et en couleurs les hôtels, restos et bars les plus cool de la planète – dont ceux de sa bande d’amis de l’Experimental Group – à Paris, Londres, Ibiza, Venise, Minorque, et Saint-Moritz prochainement

Dorothée Meilichzon a l’art de créer du confort, de l’intimité et de la convivialité, mais c’est par le design industriel que cette fan de Raymond Loewy, l’homme derrière les plus célèbres logos, a commencé sa vie professionnelle après des études dédiées à Strate Paris puis à la Rhode Island School of Design.« Le design industriel permet d’apprendre à créer des produits en fonction d’un besoin identifié, de se poser les bonnes questions : quelle est l’histoire du lieu, son contexte, qui va y venir et comment va-t-on se l’approprier ? On ne fait pas les choses gratuitement, on garde constamment à l’esprit cette approche conceptuelle pour créer des endroits uniques et raconter des
histoires bien installées dans leur environnement. L’ensemble doit être le plus hospitalier possible. L’expérience qu’on va y vivre, le moment qu’on va y passer, le confort qu’on va y trouver, c’est crucial pour moi
 », résume-t-elle. Avec Dorothée Meilichzon, on est dans le maximalisme assumé qui exalte les couleurs chaleureuses, les motifs foisonnants, les formes arrondies et confortables. « J’ai du mal à dessiner les carrés », s’amuse la décoratrice qui affectionne par ailleurs les enduits à la chaux et les matériaux naturels, simples, pris pour ce qu’ils sont, les cotons et lins, les laines et cachemires, les essences de bois choisies pour leur esthétique intrinsèque et les minéraux à l’infini (marbre, travertin, pierre calcaire, céramiques, émaux). Pour parler de son travail, la référence aux Arts déco revient périodiquement. « Sans doute parce que je suis Parisienne, et que l’Art déco est très présent à Paris. » Cette influence parfois inconsciente est absolument assumée dans l’hôtel Bachaumont, un joyau de l’époque, en plein quartier Montorgueil, qu’elle habille en 2015 avant de dresser le décor du restaurant et du cocktail bar fin 2020. « À Paris, nous avons beaucoup travaillé dans les mêmes arrondissements – 9e et 10e –, on ne peut donc plus tellement tirer d’informations du berceau historique. La forme du bâtiment, y compris lorsqu’elle est contraignante, peut alors se révéler une formidable source d’inspiration », reprend-elle. Et c’est en effet le défi qui lui a été posé lorsqu’il a fallu refaire la totalité des chambres triangulaires de l’hôtel Panache, situé à la pointe reliant les rues du Faubourg Montmartre et Geoffroy Marie, un exercice de géométrie qu’elle réussit haut la main, transformant un sérieux inconvénient en bel atout.

Dorothée meilichzon portrait

Pour l’Hôtel Grands Boulevards, l’une des perles de l’Experimental Group, elle montre toute l’étendue de sa palette créative, des chambres au restaurant façon jardin d’hiver, en passant par le rooftop (The Shed) et le bar à cocktails (The Shell), un boudoir moderne dans des camaïeux carminés soulignés de cuivre rougeoyant. « L’édifice est un ancien hôtel particulier construit sur un
jardin juste avant la Révolution Française, à l’époque où ce quartier – central et urbanisé aujourd’hui – était encore très arboré. C’est l’un des derniers vestiges de l’époque Louis XVI qui, pour un décorateur, reste foisonnante et passionnante. J’ai voulu ramener ce passé bucolique à l’intérieur, installer comme une pause dans le temps. Légèrement en retrait de la rue, la situation de l’édifice s’y prête parfaitement et lorsqu’on quitte le boulevard, très dense, pour y entrer, on est saisi par le calme. J’ai donc pensé à la ferme de Marie-Antoinette, au Petit Trianon…
 » De fait, on retrouve çà et là des clins d’œil à Versailles, des baldaquins, le parquet réinterprété sous forme de motif, des jeux de miroirs, du marbre corail, le tout mâtiné de quelques pièces rustiques. Chaque chantier est l’occasion de créer un mobilier sur mesure, qui tisse les éléments entre eux, sert de trame à l’histoire racontée. « Je n’ai jamais dessiné un meuble comme un élément autonome qui pourrait être édité. Et je ne suis pas sûre d’avoir envie de rajouter une énième chaise sur un marché déjà saturé, à moins qu’il s’agisse d’une collection particulière ou de revenir à mon métier de designer industrielle et de réaliser des objets avec une vraie fonctionnalité. » Et exception faite de l’exercice annuel qu’elle effectue pour la vente aux enchères de l’association La Source, fondée par Gérard Garouste, qui consiste à revisiter une icône du design, le tabouret Solvay de Jean Prouvé en 2020, qu’elle a grossi six fois dans une version baptisée Gonflay. 

Grand BDV chambre
Par Florence Halimi - Publié le

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