La nouvelle ère de Notre-Dame
Si, dans un premier temps, l’idée d’une cathédrale résolument contemporaine avait été envisagée, il a été finalement décidé de rebâtir la cathédrale gothique à l’identique. Ainsi, la nouvelle flèche a-t-elle été reconstruite de façon similaire à celle conçue au XIXe siècle par l’architecte Eugène Viollet-le-Duc. Un homme dont les travaux ont littéralement guidé toutes les personnes qui ont travaillé sur ce chantier pharaonique, à l’instar d’Axelle Ponsonnet, jeune diplômée en école d’architecture : « J’ai rejoint le projet en décembre 2020. Assez rapidement, j’ai été amenée à travailler sur la toiture et à réaliser des dessins et des plans. Le défi était de se mettre dans la tête de Viollet-le-Duc, puisque le bâtiment devait être exactement le même que celui d’avant l’incendie. Il faut imaginer que nous n’avons pas seulement effectué une longue restauration qui a duré plusieurs années. Notre travail a sur- tout consisté en une reconstruction à neuf de Notre-Dame, avec des matériaux d’époque. »
Une atmosphère unique
Frappée par une seconde catastrophe en 2020 avec la pandémie de Covid, Notre-Dame n’a véritablement entamé son processus de restauration que l’année suivante. Embauchée quelques mois avant la crise sanitaire, Mylène Perdoen a commencé son long travail de recherches en 2021. Cette archéologue du patrimoine sonore a pour habitude de se replonger dans le passé de différents monuments afin de saisir au mieux leurs ambiances sonores. Travailler au sein du mythique joyau gothique a été une expérience unique pour elle : « Le son de Notre- Dame est particulier pour plusieurs raisons. Tout d’abord, nous sommes dans le centre de Paris. Par ailleurs, contraire- ment à certaines cathédrales iconiques comme celles de Strasbourg ou Clermont-Ferrand, elle ne surplombe pas la ville mais est alignée avec les toits des immeubles de l ’Île de la Cité. C’est un bâtiment qui a toujours été solidement implanté dans la ville. Enfin, Notre-Dame, c’est également une acoustique unique au monde. » Lieu solennel par excellence, l’édifice religieux a eu un impact conséquent sur toutes les personnes qui ont travaillé sur le chantier.
Malgré l’incendie et les nombreuses parties de la structure qui ont été abîmées, le monument n’avait rien perdu de sa superbe. « Lorsque je suis entrée pour la première fois dans Notre- Dame, plusieurs mois après la catastrophe, j’ai ressenti quelque chose de très fort, d’assez indescriptible. En raison de la toiture qui avait été détruite, les voûtes étaient trouées. La lumière passait au travers et j’ai eu l’impression de vivre un moment suspendu. Malgré les nombreux échafaudages, j’ai vu quelquechose de sublime que je ne suis pas près d’oublier», observe Axelle Ponsonnet. Reconstruite à l’identique, la cathédrale a également été nettoyée en profondeur. Décapée et désincrustée des affres du temps, la pierre a même retrouvé sa couleur d’origine. Oubliées les nuances sombres, la nouvelle Notre-Dame se pare désormais d’une blondeur inattendue qui ne manquera pas d’intriguer les Parisiens. « C’est un bâtiment qui va subjuguer les visiteurs mais aussi les surprendre. Difficile de reconnaître le monument, assez austère, que le grand public connaissait jusqu’à présent. Les générations les plus récentes vont découvrir le site sous un nouveau jour. Pour désincruster la pierre, souillée par les effets de l’incendie, les équipes ont appliqué du latex sur les zones les plus incrustées. En enlevant les bandes, le résultat était bluffant. La pierre avait retrouvé sa couleur d’origine sans que l’on ait besoin d’appliquer de la peinture », constate avec émerveillement Axelle Ponsonnet. Une splendeur retrouvée pour une cathédrale qui fait place à quelques nouveautés. À commencer par la vaisselle liturgique, qui est désormais en bronze. Une mission qui a été celle de l’artiste designer Guillaume Bardet : « Le 17 avril 2019, deux jours après l’incendie de Notre-Dame, je faisais le vernissage de mon exposition à la Galerie Kreo, rue Dauphine. J’avais travaillé sur un format en bronze XXL qui était une métaphore biblique de La Cène. En voyant mon travail, plusieurs personnes sont venues me voir et m’ont dit qu’il fallait que je réalise le nouvel autel de la cathédrale. Je n’y avais pas pensé, mais l’idée a fait son chemin dans ma tête et je me suis senti assez légitime pour répondre à l’appel d’offres sur la reconstruction de Notre-Dame. »
Un nouveau parvis
Outre un tout nouveau mobilier et des objets liturgiques flambant neufs, le site s’accompagne d’un parvis complètement repensé pour l’occasion. Imaginé comme une clairière, il donne une large place à la végétalisation. D’autre part, l’ancien parking souterrain, situé sous le parvis actuel, va également subir un relooking de taille puisqu’il sera transformé en une grande promenade intérieure. Sur 3 000 m2, les visiteurs auront le choix entre une librairie, un café ou l’accès unique à la crypte archéologique.
Reste la question du prix. Annoncée un temps comme payante, l’entrée de la cathédrale restera finalement gratuite comme l’a confirmé l’archevêque de Paris, Laurent Ulrich, dans une conférence de presse. Ouverte à tous et majestueuse, Notre-Dame n’attend plus que de retrouver ses fidèles ou ses simples visiteurs. Le temps des cathédrales a encore de beaux jours devant lui.
Notre-Dame en fête
- Pour célébrer la réouverture de Notre-Dame, de nombreux événements sont proposés aux Parisiens. À commencer par l’expérience immersive en réalité virtuelle, Éternelle Notre-Dame, sous le parvis de la cathédrale jusqu’en mai 2025. Jusqu’au 31 décembre, le monument est également à l’honneur au Théâtre de Poche Montparnasse avec les lectures Notre-Dame, reine de douleur, reine de victoire, qui reviennent sur les voyages physiques et spirituels de l’écrivain Sylvain Tesson. Toujours en décembre (les 20, 21 et 22), le Palais des Congrès accueille La Dame de pierre, le spectacle hommage à la mythique cathédrale. Du côté des autres événements, la boutique Haviland (6 rue Royale, 8e) accueille une exposition immersive jusqu’au 4 janvier dans laquelle le visiteur est invité à un dîner auquel Victor Hugo aurait pu assister, après avoir imaginé l’intrigue de Notre-Dame de Paris. Plus que jamais, Notre-Dame est à la fête !