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Youssef Marzouk : le goût des contrastes

Seulement sept mois après l’ouverture d’Aldéhyde dans le Marais, Youssef Marzouk décroche une première étoile au Guide Michelin. Une fulgurance maîtrisée pour ce jeune chef passé par de très belles maisons — Ritz, Cheval Blanc, Tomy & Co — et également formé à la chimie et à la pâtisserie. Chez Aldéhyde, il compose une cuisine française affûtée, électrisée par l’acidité des vinaigres, la fraîcheur des herbes et des souvenirs d’enfance tunisienne, le tout dans une atmosphère aussi exigeante et chaleureuse qui colle bien au personnage. À 32 ans, il impose une vision précise, florale, audacieuse, façonnée par ses racines et un goût prononcé pour l’équilibre des contrastes. Rencontre avec un chef qui, loin des poses, cuisine avec cœur, science et intensité — et dont l’alchimie a conquis la critique… comme les palais les plus avertis.

ALDÉHYDE

5 rue du Pont Louis-Philippe, Paris 4e Tel : 09 73 89 43 24 aldehyde.paris/

Sept mois seulement pour décrocher une étoile. Comment avez-vous vécu cette fulgurance ?

Youssef Marzouk : « Nous sommes très heureux de cette distinction même si notre but premier n’était pas de la décrocher à tout prix. L’objectif était la rentabilité, la stabilité, créer un concept qui nous ressemble et nous faire plaisir. Au final l’aventure a bien pris, les clients comme les inspecteurs ont aimé l’alchimie que nous proposons, et nous avons été récompensés pour cela. »

 

Vous êtes chimiste de formation. En quoi cela influence-t-il votre cuisine ?

Youssef Marzouk : « Ma formation m’aide à créer des associations clivantes. Il suffit de connaître le nombre de molécules en commun entre des ingrédients pour savoir qu’olive noire et fraise, par exemple, vont parfaitement ensemble. Après tout, la cuisine et la pâtisserie sont des réactions chimiques entre ingrédients. »

 

Pourquoi le nom « Aldéhyde » ?

Youssef Marzouk : « Pour le caractère clivant de cette molécule. Nous voulions une cuisine d’auteur, osée, quitte à ne pas plaire à tout le monde. L’aldéhyde est notamment présente dans la coriandre. C’est aussi un clin d’œil à mon passé de chimiste. On le retrouve dans toutes les fleurs, et notre cuisine est très florale, inspirée par celle de ma mère qui utilisait des eaux florales. »

 

Votre cuisine accorde une grande place aux vinaigres, fermentations et herbes. Pourquoi ?

Youssef Marzouk : « On adore l’acidité, la fraîcheur, les goûts tranchés. Cela donne une cuisine plus digeste et actuelle. C’est aussi un moyen de respecter le produit et le travail du producteur, en utilisant tout ce qu’il nous offre. »

 

Comment vos racines tunisiennes s’expriment-elles dans votre cuisine ?

Youssef Marzouk : « Par touches tout au long du repas : l’art de la table, de recevoir, la profusion de plats, typique de la Tunisie. Et dans certains mets, comme un prédessert au citron jaune et géranium rosat inspiré de mon petit-déjeuner d’enfance. »

Vous avez travaillé avec Nicolas Sale, Tomy Gousset et Arnaud Donckele. Que vous ont-ils appris ?

Youssef Marzouk : « Nicolas Sale m’a transmis l’amour du produit et des traditions françaises. Tomy Gousset m’a montré qu’on peut allier gastronomie et entreprenariat, et m’a inspiré à revendiquer mes origines. Le chef Donckele m’a offert une vision centrée sur les sauces, il a été un véritable mentor. »

 

Pourquoi ce choix de maîtriser à la fois cuisine et pâtisserie ?

Youssef Marzouk : « Je suis fils d’un pâtissier et d’une restauratrice. J’ai grandi dans ces deux univers. Ils sont indissociables pour moi. Être polyvalent est une richesse que je veux transmettre aux futures générations. Un bon dessert utilise aussi des techniques de cuisine, et inversement. »

 

Votre cuisine est très esthétique. Quelle importance y accordez-vous ?

Youssef Marzouk : « L’esthétique compte, car on commence par manger avec les yeux. Une belle assiette donne envie, mais le goût doit être à la hauteur. L’élégance doit servir le goût, toujours. »

 

Votre équipe vous suit depuis plusieurs maisons. Quel est votre secret ?

Youssef Marzouk : « Notre force vient de valeurs communes et d’une vraie amitié. Nous avons tous des parcours différents, ce qui enrichit notre vision collective. Et j’essaie d’être un exemple en cuisine, comme mes anciens chefs l’étaient. »

 

Et maintenant, une seconde étoile ? Une nouvelle adresse ?

Youssef Marzouk : « Non, l’important c’est avant tout de continuer à se faire plaisir, à évoluer. Le restaurant est encore jeune. Restons concentrés sur ce que nous avons construit avant d’envisager d’autres projets. »

  • Déjeuner à partir de 35 €
  • Dîner à 95 € (5 temps) ou 120 € (7 temps)
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