Interview

Hugo Bourny : Un chef étoilé et locavore

Le nom de la Maison Lucas Carton résonne comme un étendard de la haute gastronomie. À la tête de cette légende parisienne, couronnée d’une étoile Michelin, le chef Hugo Bourny insuffle une vision nouvelle, marquée par un profond respect du terroir et une quête incessante d’authenticité.

Dans une interview exclusive, il révèle les contours d’une carrière jalonnée par des rencontres déterminantes avec des icônes telles qu’Arnaud Donckele et Anne-Sophie Pic, qui ont modelé son approche et son exigence. Aujourd’hui, il se consacre à une cuisine qui privilégie les produits locavores, en parfaite harmonie avec les saisons. Il nous a invité dans les coulisses de son univers culinaire, où l’innovation se mêle à la tradition pour célébrer la richesse des saveurs franciliennes.

Lucas Carton

9 Place de la Madeleine, Paris 8e www.lucascarton.com/
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Le Petit Lucas

9 Galerie de la Madeleine, Paris 8e www.lucascarton.com/le-petit-lucas
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Pourriez-vous nous parler de vos premiers pas en cuisine ?

Hugo Bourny : « Je suis entré dans la cuisine sans réelle passion héritée de la famille ; chez nous, manger était un simple acte nourricier. Adolescent, un peu à la dérive, j’ai choisi ce métier pour gagner mon indépendance. À 16 ans et demi, j’ai démarré dans le restaurant gastronomique de Johan Leclerc, détruit en 2010 par la tempête Xynthia. Cette expérience a été un déclic, trans- formant la cuisine en véritable vocation, mais aussi en bouée de sauvetage ! »

Vous avez par la suite travaillé avec quelques grands chefs ?

Hugo Bourny : « Oui. Arnaud Donckele m’a enseigné la passion et la transmission en cuisine, insistant sur l’importance de partager l’intention derrière chaque plat. Chez Anne-Sophie Pic, où j’ai passé 11 ans, j’ai acquis une précision unique et appris à créer des plats innovants à partir d’une riche bibliothèque de saveurs. Elle combinait aisément des ingrédients pour des accords époustouflants. Enfin, Hélène Darroze m’a marqué par son approche centrée sur le terroir et la provenance des ingrédients, valorisant une cuisine sincère et fidèle à son héritage culinaire. »

C’est le cheminement de votre philosophie culinaire au Lucas Carton ?

Hugo Bourny : « C’est ma première place de chef, et c’est un restaurant qui a une histoire. La première année, la majorité des clients ne venaient pas chez Lucas Carton pour goûter ma cuisine, mais parce que c’est un nom qui incarne à lui seul la grande restauration. Il ne m’a pas été facile d’imposer mon univers culinaire. Aujourd’hui, après presque 3 ans, j’ai développé un concept basé sur le terroir francilien et le locavorisme. Nous nous approvisionnons dans un rayon de 200 km, tirant parti des légumes, viandes, et volailles locaux, et avons établi un réseau solide d’éleveurs et de maraîchers. »

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Face à la Madeleine, sous les boiseries historiques de Majorelle, le décor du Lucas Carton invite à un voyage dans le temps, sous les auspices de son chef Hugo Bourny.

 

Votre cuisine est très végétale. Est-ce une tendance que vous aimeriez peut- être développer ?

Hugo Bourny : « Ce n’est pas une volonté stricte, mais nous avons tous un devoir de responsabilité. J’essaye d’utiliser le produit dans son intégralité et je ne me vois pas du tout me retrouver, un jour, à jeter des fanes de navets ! C’est une démarche naturelle pour moi, mais dans mes assiettes, en termes de proportions, je fais en sorte que le végétal ait toute sa place et puis, accessoirement, c’est plus digeste, notamment aux dires des clients. Même quand on décide de crémer un peu une sauce, on ne fait pas des réductions à outrance pour que cela reste dans la légèreté. »

Quelle relation entretenez-vous avec vos fournisseurs ?

Hugo Bourny : « Mon processus de création vient d’abord des produits. C’est une relation extrêmement importante à partir du moment où l’on suit une saisonnalité, parce qu’on sait que l’on n’a que trois mois devant soi, voire moins pour certains produits. Cela procure une espèce d’urgence qui vous force à l’instantanéité et à renouveler beaucoup plus souvent la carte. On a donc le besoin essentiel d’avoir cette relation directe avec eux. »

Vos voyages ont-ils influencé votre vision de la cuisine ?

Hugo Bourny : « Paradoxalement, les moments où j’ai le plus voyagé, c’était dans les cuisines d’Anne-Sophie Pic, à travers les ingrédients qu’on travaillait. Mais quand je pars en vacances, je sais qu’il y a au moins un produit qu’il faut que je découvre dans son propre élément. Aura-t-il le même goût ? Sera- t-il travaillé de la même manière ? Tout cela peut influencer ma façon de travailler ce produit, comme avec le poivre noir de Phu Quoc, que j’ai redécouvert au Vietnam, où j’ai pu voir les grains à différentes maturités, le climat, les odeurs étouffantes et piquantes qui se dégageaient des grappes. Les voyages permettent d’avoir une bibliothèque de références beaucoup plus large. »

Pour finir, comment aimeriez-vous que l’on se sou- vienne de votre passage au Lucas Carton ?

Hugo Bourny : « Le seul souvenir qu’il me plairait de laisser de ma période au Lucas Carton, ce serait juste un plat. N’importe lequel, mais à condition que les clients en aient gardé un souvenir culinaire ! »

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Par Manuel Mariani - Publié le

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