Interview

Pierre Renart Essences uniques

Pierre Renart a le goût du bois depuis l’âge de 5 ans, lorsqu’il bricolait des karts, des trottinettes, des meubles déjà... À l’école Boulle, il sort major de sa promotion. Représenté depuis douze ans par la galerie Maison Parisienne, il est sollicité par les marques de luxe et la fine fleur des décorateurs, séduits par les courbes, les boucles et les envolées boisées de ses créations, dont certaines sont entrées dans les collections du musée des Arts Décoratifs et du Mobilier National, pour être installées en ce moment à l’hôtel de Matignon.

D’où vous vient cette passion du bois, de l’ébénisterie ?

Pierre Renart : Dès l’enfance, cela s’est imposé comme un moyen d’expression, la possibilité de créer des objets, et c’est naturellement devenu un choix d’orientation professionnelle. J’ai eu la chance d’entrer à l’école Boulle, une école d’art qui laisse la liberté de développer ses projets, de cultiver ses centres d’intérêt, de se nourrir de connaissances.

Pourquoi les lignes courbes, pour la difficulté de l’exercice ?

Pierre Renart : J’aime créer des meubles qui donnent l’impression que la forme préexistait, comme dans la nature qui ne connaît pas la ligne droite, qui est une succession de sinuosités et d’arborescences. Je poursuis un double objectif : concevoir des formes fluides comme dans un seul mouvement, qui sortent de leur archétype ; et valoriser le bois, sublimer la matière, en produisant une esthétique originale et ergonomique qui interpelle.

Tout a commencé par le fauteuil Genèse, qui vous a permis d’obtenir la note de 20/20 à l’école Boulle. Quelle est son histoire ?

Pierre Renart : Il s’agissait de mon projet de fin d’études pour lequel j’ai recréé un fauteuil Art déco de Raymond Gillet, très pur par ses lignes, et qui demandait beaucoup de maîtrise pour sa réalisation. Je l’ai d’abord reproduit à l’identique pour peaufiner ma technique avant de chercher à prolonger l’esprit Art déco avec les moyens contemporains, en réalisant son avatar en fibre de carbone. Dans la foulée, il a été présenté aux Journées du Patrimoine sur le stand de l’école Boulle, au Carrousel du Louvre, ce qui m’a permis d’être repéré par Florence Guillier Bernard, de Maison Parisienne. Les premières commandes ont suivi, et j’ai pu monter mon atelier.

Comment votre technique a-t-elle évolué depuis douze ans, en quoi les matériaux de pointe ont-ils nourri votre création ?

Pierre Renart : Les composites m’ont donné la liberté de sortir du cadre, de faire des choses plus folles, mais aussi de revenir à l’essence, comme une étape incontournable pour parvenir au 100 % bois. Pendant longtemps, j’ai créé des structures en fibre de carbone que je recouvrais de bois, pour obtenir la résistance du premier et l’aspect du second. Après de nombreux essais et expérimentations, j’ai pu m’affranchir du composite et obtenir la résistance voulue avec le bois exclusivement, comme sur le fauteuil Genèse que je fabrique désormais intégralement en noyer d’Amérique.

Vous collaborez avec Longchamp et d’autres maisons de luxe comme Dior, le Studio Harcourt… Comment travaillez-vous les espaces publics ?

Pierre Renart : Mes pièces ont du mouvement, elles donnent de la dynamique à l’espace, il y a donc un lien intéressant à faire avec le sens de la circulation. Elles doivent aussi refléter l’identité de la marque. J’ai par exemple réalisé une console Möbius en bois grisé, du fameux gris Dior, pour une boutique de la maison. Pour Longchamp, j’interviens à chaque renouvellement de showroom, en fabriquant une table basse Wave sur mesure avec des déclinaisons sur les dimensions et les finitions selon l’ambiance souhaitée.Très récemment, j’ai ainsi fabriqué une console Möbius de trois mètres de long pour la vitrine du showroom Longchamp de Regent Street à Londres. Et pour que le café Harcourt incarne l’esprit du studio, j’ai réalisé des meubles en fibre de carbone qui offrent des jeux de lumières très forts, comme un clin d’œil immédiat aux portraits noir et blanc.

Sur quoi travaillez-vous aujourd’hui ?

Pierre Renart : Je réalise un meuble de très grande dimension pour un particulier. C’est un exercice stimulant car il combine deux fonctions – bar et bureau – qui ne s’accordent pas naturellement. Et collaborer avec une grande architecte d’intérieur, Stéphanie Coutas en l’occurrence, se fondre dans l’univers qu’elle a choisi, est toujours très intéressant. Je finalise également un meuble central pour une boutique-écrin de haute joaillerie rue du Bac, et je prépare de nouvelles pièces pour le PAD Londres en octobre et pour les quinze ans de Maison Parisienne à la fin de l’année.

Par Florence Halimi - Publié le

Vous aimerez sûrement les articles suivants…

Rejoignez-nous sur Instagram Suivre @ParisCapitale