Reda Amalou, éclectique par nature
Il se montre tout aussi prolifique dans son activité de designer, avec des collections éditées sous sa marque Reda Amalou Design, et des pièces exclusives, uniques ou en séries très limitées, créées avec la fine fleur des maîtres d’art. Ces pièces font l’objet d’une exposition à la Secret Gallery, dans une scénographie originale ou le mobilier se mêle et dialogue avec des oeuvres d’art choisies par les maîtres des lieux.
Comment définiriez-vous votre style et comment celui-ci a t-il évolué au fil de votre carrière ?
Reda Amalou : « Il est influencé par l’esthétique européenne du XXe siècle, qui fut ma première culture en design et en architecture, mais il est surtout éclectique, multiculturel et à ce titre assez indéfinissable. Il se nourrit de mes voyages, de cultures, d’échanges, de découvertes, de savoir-faire nés à l’autre bout du monde. Et par mes origines – Je suis Algérien par mon père, Français par ma mère, j’ai grandi en Angleterre – j’ai une sorte d’éclectisme inné. Je vois donc mon style comme assez ouvert, sur l’ailleurs et sur l’autre. »
Vous avez le goût des matières, dont vous aimez repousser les limites…
Reda Amalou : « Le travail sur la matière fait la richesse de l’objet, et je m’efforce de lui apporter quelque chose de nouveau. Ce qui m’intéresse, c’est de la découvrir, d’appréhender toutes les façons de la travailler, et une fois passé cet apprentissage, de mettre la matière dans des situations inhabituelles. C’est d’expérimenter au-delà du geste de designer toutes ses possibilités, la pousser un peu plus loin, la penser et la mettre en scène différemment. C’est, par exemple, changer l’échelle de l’utilisation, comme avec la coquille d’œuf ou l’émail cloisonné, destinés traditionnellement à orner des objets de tailles réduites, que je vais travailler sur des pièces importantes. C’est aussi chercher la profondeur dans une laque à la main, aller au-delà de sa brillance, en l’utilisant sur des objets relativement simples dans le dessin – comme les tables Dot et Pop – sobres dans leur expression, mais sublimés par la matière. »
Selon vous, qu’est-ce qu’une pièce de mobilier réussie ? Que doit-elle conjuguer ?
Reda Amalou : « En architecture l’émotion passe par l’espace, il y a quelque chose d’intangible, d’indéfinissable. En revanche, le rapport à l’objet passe par le contact physique. On s’assied sur une chaise, on travaille sur une table, on se détend sur un canapé… Le dessin doit entrer en résonnance avec celui qui le regarde et donc créer un moment d’émotion tout en remplissant ses objectifs fonctionnels. Le design d’art est un peu différent pour moi, il s’apparente à la sculpture et sa fonction peut disparaître en partie. »
Vous collaborez avec de grandes maisons comme Veronese, Roche Bobois, Baccarat… Comment travaillez-vous avec elles ?
Reda Amalou : « J’essaie de trouver l’équilibre entre l’ADN très forte de la marque et ma propre expression. Ces grandes maisons sont très définies. Je cherche à m’inscrire dans cette définition tout en apportant la vision que j’ai d’elles. En se pliant à ces exercices, on s’enrichit. À chaque objet on apprend, à chaque dessin on progresse, le dessin suivant se nourrit de ceux d’avant. C’est une forme de continuité et d’apprentissage permanent. »
Comment avez-vous évolué depuis 25 ans, les préoccupations environnementales se sont-elles invitées dans votre travail ?
Reda Amalou : « Avec l’agence d’architecture, on s’est inscrit très tôt dans une démarche écologique sans le formuler, mais par la force des choses : le fait de travailler loin de nos bases nous a contraints à utiliser des matériaux et des savoir-faire locaux, et à confronter notre architecture au climat et à l’environnement immédiat. Notre premier bâtiment en bois date ainsi de 1997. Et dans mon activité de designer, je me pose naturellement la question du sourcing de la matière, du transport des objets, de leur durabilité… Cette démarche est aujourd’hui intrinsèque à notre métier. »
Pourquoi fait-on appel à votre agence d’architecture, c’est quoi la marque AW2 ?
Reda Amalou : « On a commencé, il y près de 25 ans, en Asie du Sud Est, où l’hôtellerie se modifiait profondément pour devenir plus expérientielle, aussi bien dans le traitement de l’espace physique qu’en termes de culture, de bien-être, de nourriture, d’ambiance. On s’est inscrit dans cette démarche et, aujourd’hui, créer des hôtels-destination, qui apportent un plus au client, une âme, un esprit, est devenu notre marque de fabrique. »