Interview

Hugo Toro : artiste total

Talentueux au pluriel, Hugo Toro est un artiste à 360°, un être dual qui se partage entre sa peinture et ses nombreux projets architecturaux. Pétri par les voyages vécus dès son plus jeune âge en famille, fils d’une mère mexicaine et d’un père français, ce passionné sorti major de Penninghen, est curieux de tout. Il s’investit à 300 % dans chaque projet, qu’il s’agisse de réinventer en profondeur le restaurant étoilé Pur’ du Park Hyatt Paris-Vendôme (retravaillé comme un appartement de chef), d’un lieu résidentiel ou de la création ex nihilo d’un hôtel. Il signe ainsi le tout premier hôtel Orient Express, La Minerva, à Rome, qui ouvrira prochainement ses portes, après avoir dessiné le corner dédié à la célèbre ligne de chemin de fer à La Samaritaine. Parallèlement il s’apprête à exposer ses toiles lors d’une exposition parisienne baptisée “Les Murmures de l’eau” à l’ambassade du Mexique en janvier puis à l’Institut culturel du Mexique en février.

Votre création est protéiforme, elle prend des accents voyageurs, d’où vient ce goût ?

Hugo Toro : « Certainement des voyages qui nourrissent mon travail, et de ma mère, une femme forte et très créative, qui m’a permis de vivre le Mexique de manière subliminale et fantasmée, à travers son regard, ses histoires, son goût des couleurs, sa générosité. Et cela vient aussi de ma relation avec mon grand-père paternel, dont les bureaux se trouvaient dans une gare et avec lequel je me promenais dans les trains désaffectés. J’étais fasciné par cet univers. On retrouve d’ailleurs des détails ferroviaires dans mon architecture. »

Comment travaillez-vous et qu’est-ce qui vous inspire ?

Hugo Toro : « Dans la pratique, je dessine beaucoup et j’utilise également des techniques très modernes de modélisation. Je ne suis pas forcément inspiré par un style – mes goûts en archi- tecture sont éclectiques – mais plutôt par la narration qui est derrière, le talent de raconter quelque chose à travers un projet. J’aime m’intégrer dans un contexte, faire preuve d’empathie, comprendre qui va être l’utilisateur avant de construire un ensemble et de raconter l’histoire. »

Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?

Hugo Toro : « L’agence compte plus de vingt collaborateurs, du coup nous répondons à des projets très différents qui vont aussi bien de l’hôtel Orient Express à Rome, à la Villa W à New York, ou à une demande du Mobilier National. Dans chaque projet, tout est dessiné et réalisé sur mesure, je n’achète jamais de mobilier. Pour Pur’ par exemple, j’ai dessiné jusqu’aux uniformes, aux assiettes, couteaux, tissus, bougeoirs, beurriers, ronds de serviettes… Je ne vais jamais sortir une pièce d’un projet architectural pour l’inclure dans une collection de mobilier. Elle marche dans le projet en tant que partie d’un écosystème. »

Pourquoi fait-on appel à vous ?

Hugo Toro : « On vient me chercher pour avoir un univers à 360° chaleureux et pérenne, qui relie le passé, le présent et le futur. Un univers en transition, qui n’est pas en rupture avec les éléments forts existants mais qu’on accompagne et auquel on ajoute une stratification. »

Qu’est-ce qui vous donne envie d’accepter un projet ?

Hugo Toro : « C’est inexplicable, il faut que je le ressente, et surtout que je sache avec qui je vais me “marier” pendant un ou deux ans. D’ailleurs, les relations que j’entretiens avec mes clients sont basées sur le partage, elles se pérennisent souvent et donnent lieu à d’autres projets comme avec l’Orient Express. Quand j’accepte un projet, je suis impliqué et présent, je le connais sur le bout des doigts. Pour un lieu privé par exemple, je demande souvent au propriétaire de m’inviter à prendre le petit déjeuner pour voir comment les habitants vivent, quel est leur rythme, s’ils se lèvent tôt, quelles lumières ils aiment, s’ils sont ordonnés ou pas… puis je bâtis mon scénario. »

Quel est la différence entre Hugo Toro l’architecte et Hugo l’artiste ?

Hugo Toro : « D’abord, mes tableaux ne s’inscrivent jamais dans mes projets d’architecture, c’est un autre travail, même si on peut retrouver des points communs, des codes, des cou- leurs. Lorsque je peins, ce n’est plus mon esprit qui parle mais mon cœur, je peux peindre douze heures d’affilée, sans manger, sans réfléchir, presque dans un élan vital. Il y a une sorte d’urgence, ça doit sortir. »

Que va-t-on découvrir lors de votre exposition à l’ambassade et à l’Institut culturel du Mexique à Paris ?

Hugo Toro : « Je peins des œuvres de très grand format, sur un Mexique inconscient, qui est en moi, avec des détails, des éléments qui ressurgissent à la surface, comme une réminiscence des récits de ma mère. L’eau, qui est une obsession chez moi, y est omniprésente sous une forme ou sous une autre, comme un fil rouge. L’idée n’est pas de montrer comment le Mexique regarde vers la France mais comment la France regarde vers le Mexique, et pour moi c’est un peu toute la métaphore de ce que je suis. »

Par Florence Halimi - Publié le

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