Interview

Marina Hands, Une carrière menée au trot

Comédienne singulière et d’une grande élégance, couronnée du César de la meilleure actrice pour sa prestation dans l’amant de Lady Chatterley de Pascale Ferran, Marina Hands a su tracer sa route par des choix judicieux. Récemment l’affiche d’Actrice  la pièce de Pascal Rambert, jouée aux Bouffes du Nord…

Marina, avec pour parents Ludmilla Mikael et Terry Hands, metteur en scène anglais longtemps directeur de la prestigieuse Royal Shakespeare Company, on vous imagine biberonnée au métier …

Oh non, pas du tout ! Tout d’abord parce que mes parents se sont séparés lorsque j’avais un an. Ensuite parce qu’ils m’ont toujours tenue à l’écart du métier. Je n’étais pas dans le grand bain et ils ne voulaient pas entendre parler de cela pour moi ! Il n’y avait pas d’artistes à la maison et ma mère, qui m’a élevée, a toujours souhaité que je reçoive une éducation normale. Lorsque j’allais voir mon père à Londres, je restais dans le bureau de sa secrétaire qui m’apprenait à taper à la machine. C’est vous dire si ce milieu ne m’attirait pas.

Par quoi était donc attirée la petite fille que vous étiez ?

Dès mon plus jeune âge, j’ai rêvé d’une carrière sportive et ma passion pour les chevaux s’est révélée très tôt. A quatre ans, c’était déjà toute une histoire pour me faire descendre de mon poney dans le jardin des Tuileries ou du Luxembourg. En grandissant, élevée dans les beaux quartiers, j’allais prendre le train chaque jour pour monter à cheval. Je rêvais d’une carrière de sportive de haut niveau dans l’équitation. Ma mère m’a toujours soutenue dans ma démarche. Moralement et financièrement.

Comment cela se passait-il en classe ?

Moyennement car claustrophobe, j’avais du mal à tenir en place. Et puis, j’avais pris anglais première langue ce qui était une arnaque car j’étais bilingue ! (Rires) Après le bac, j’ai pris une année sabbatique pour m’entrainer davantage et intégrer l’équipe de France Junior. Je suis sélectionnée aux championnats d’Europe mais mon cheval se blesse une semaine avant l’épreuve. L’année suivante, mon cheval se blesse une nouvelle fois. Je comprends alors que je n’ai pas les nerfs assez solides pour faire ce métier. Je me dis que c’est trop dur, que je n’y arriverai jamais. J’étais besogneuse, mais pas super douée. Je l’ai senti

Un constat qu’on imagine douloureux.

J’étais ravagée. Je n’avais plus de gout à rien. J’ai craqué. A 19 ans, j’ai fait une dépression assez grave. Et puis je me suis inscrite au cours Florent car j’aimais le théâtre. Ma première idée était d’intégrer Zingaros ou un théâtre équestre. J’étais attirée par le travail de troupe, les familles de cirque comme les Gruss. A l’époque, je n’étais pas très bien. Je n’avais pas l’énergie de faire des castings, de devenir une actrice connue. J’étais un peu en errance.

 

Marina Hands Interview

On vous retrouve pourtant ensuite à la Comédie Française

MH : Mon professeur m’avait poussée à faire le Conservatoire. Le fait que des gens me reconnaissent du talent m’a soignée. Les résultats ont été très immédiats et j’ai pu gagner ma vie assez vite. Cela m’a permis de reprendre confiance en moi et de ne plus dépendre financièrement de ma mère. Je suis restée deux ans au Français mais ce n’était pas pour moi. Je voulais continuer à butiner et ne souhaitais pas me fixer.

Et puis, parallèlement à votre carrière, Guillaume Canet, votre ami d’enfance, vous remet le pied à l’étrier il y a quatre ans

M.H : Grâce à lui, pour les besoins du film Jappeloup, je me suis remise à l’équitation après quinze ans d’arrêt. Lui aussi, plus jeune avait fait une chute grave. Lui aussi avait eu peur et s’était arrêté. Pour m’aider à préparer Jappeloup, il m’a prêté une petite jument qu’il montait. Je lui dois ce geste d’amitié. Depuis ce tournage, j’ai repris en amateur et cela me rend très heureuse. Monter à cheval me permet de ne pas avoir la tête complètement dans mon métier. L’an passé, comme j’étais libre durant les vacances de Noel, j’ai proposé de travailler quinze jours aux Ecuries. J’étais là-bas du matin au soir et ce job me rendait très heureuse. Maintenant, j’ai deux chevaux à moi et aussi deux chats que j’adore.

A vous écouter parler, on a l’impression que vous avez vraiment deux vies en une …

Disons que je ne ressens pas le rêve du statut d’actrice. Je trouve cela réducteur à cause du côté omniprésent du culte de la personnalité. Moi, je rêvais d’avoir une compétence. Ce que j’aime, c’est l’art du conteur, du magicien qui va émouvoir. Sinon, dans la journée, je ne sors pas maquillée. Etre figée dans un visage encombre. Se dire qu’il faut être toujours parfaite, qu’il faut absolument perdre trois kilos, autant de contraintes auxquelles je refuse de me soumettre. Avoir une image a été très dur pour moi …

Vous avez également la réputation d’une ex grande timide.

J’ai longtemps été une taiseuse qui se sentait très bien parmi les animaux. Maintenant, j’aime beaucoup aussi être dans la vie et dans le divertissement. J’ai une culture populaire. Je n’ai pas envie d’être dans une niche . J’apprécie autant le côté caravane d’un tournage que la peur intense que j’éprouve lorsque je joue au théâtre

Aujourd’hui, votre mère est fière de vous ?

Oui, très. Elle était inquiète pour moi car elle trouvait que c’était un métier difficile. Mais la vie m’a bien traitée en me permettant de faire de belles rencontres.

Comment une jeune femme si proche de la nature supporte t elle de vivre à Paris ?

Très bien. C’est son aspect culturel qui m’attache à cette ville. Mon premier appartement se situait dans le quartier de Montparnasse. Chaque semaine, j’achetais feu Pariscope et filait voir un film ou une expo dès que j’avais une plage de libre. La semaine dernière, je suis allée au musée mais j’en suis ressortie aussitôt. J’étais agacée par ces hordes de gens qui se faisaient photographier devant le penseur en prenant eux-mêmes la pause. Sinon, je déménage tous les deux ans. Je vis actuellement dans le 16 è qui a lui-même succédé à Saint Paul et au 14 è.

Ce que vous préférez dans Paris ?

La tour Eiffel. J’en suis totalement amoureuse ! Et aussi les pelouses sur lesquelles j’ai toujours envie de m’assoir pour piqueniquer comme cela est autorisé à Londres. Je me console en arpentant les Tuileries et le Luxembourg où j’apprends souvent mes textes quand je ne prends pas de photos, une autre de mes passions.

Interview Marina Hands 2017
Bio Express

Bio Express

  • Naissance à Paris.
  • Intègre la classe libre du cours Florent.
  • Conservatoire national d'art Dramatique.
  • Premiers pas au théâtre dans le Bel Air de Londres, de l'Irlandais Dion Boucicault, qui lui vaut une nomination aux Molières.
  • Ne le dis à Personne, de Guillaume Canet.
  • Intègre la Comédie-Française.
  • César de la meilleure actrice pour Lady Chatterley de Pascal Ferran.
  • Partage de midi, de Paul Claudel au théâtre Marigny. Elle y interprète Ysé, un rôle tenu par sa mères des années auparavant.
  • Jappeloup, de Christian Duguay.
  • Sous les Jupes des filles.
  • Ivanov de Tchekhov dans une mise en scène de Luc Bon
Par Caroline Rochmann. Photos : Stéphanie Slama. - Publié le

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