Picasso disait : « Donnez-moi un musée et je le remplirai ! » En doublant la surface d’exposition de l’hôtel Salé par rapport à son ouverture en 1985, n’est-ce pas comme lui en offrir deux ?
Le musée national Picasso s’étend en effet aujourd’hui sur 5 300 m2 dont 3 800 m2 d’exposition. Il offre désormais 34 salles, soit une quinzaine de plus que précédemment avec un accrochage inaugural de quatre cents chefs-d’œuvre.
Que penserait Pablo Picasso de son musée ?
Je crois qu’il aurait posé le pinceau en se disant : « J’ai bien travaillé ! » Il était tellement obsédé par l’urgence du temps et égocentré sur son œuvre que je me demande si un tel appétit aurait pu être satisfait. Mais ce musée est un bon début de réponse…
Quelle salle vous émeut particulièrement ?
Honnêtement quand je monte l’escalier d’honneur, une merveille architecturale, j’éprouve une fierté exceptionnelle devant le buste de ma grand-mère Marie-Thérèse Walter. J’ai l’impression d’être à la maison… Et, je suis très impressionné par le dernier étage qui accueille la collection personnelle de Picasso. Une centaine de paysages, nus et natures mortes de Renoir, Degas, Gauguin, Cézanne, Matisse et aussi le Douanier Rousseau avec lequel il menait un dialogue ininterrompu. Il y a là un effet miroir puissant et Picasso semble dire : « Regardez, je suis l’un des vôtres ! »
Auteur de Picasso, l’inventaire d’une vie, un documentaire sur l’histoire de sa succession, parlez-nous de la donation exceptionnelle faite cet été par votre mère, Maya Widmaier Picasso ?
Ma mère voulait réagir face au tumulte de l’éviction d’Anne Baldasseri que, mon oncle, Claude Picasso soutenait lorsqu’il hurlait « La France se fout de mon père » alors que Laurent Le Bon était nommé président. Il fallait donner un signe fort de la famille en faveur des liens que nous tenons à garder avec le musée. Ma mère nous a donc réunis et, a choisi de donner un carnet inédit, estimé 2 millions de dollars, comprenant 38 dessins au crayon d’études de nus réalisés en avril 1960 et un dessin de 1908 représentant un visage féminin de la période cubiste. Au dos, est dessiné le bas du visage de Guillaume Apollinaire qui est en réalité la moitié d’une œuvre, l’autre moitié appartenant déjà au musée.