Désormais, les joailliers profitent de la Semaine de la haute couture pour présenter des joyaux inédits. Pour ces parures uniques, la puissance des pierres rares est mise au service de la création et inversement, mâtinée de références aux archives des joailliers. Chaque création démontre une fois de plus l’extrême virtuosité des ateliers de ces grands noms qui font briller la place Vendôme. Cette place regorge d’histoires relatives à des commandes historiques de clients célèbres. Ainsi la collection New Maharajahs de Boucheron s’est inspirée de celle passée par le Maharajah de Patiala. En août 1928, ce dignitaire indien séjourne, comme à son habitude, au Ritz. Son insatiable passion pour les bijoux est bien connue de tous les joailliers de la place Vendôme auxquels il passe régulièrement commande. Mais c’est la porte de Boucheron qu’il pousse avec son escorte portant six larges coffres de fer renfermant 2 636 diamants blancs, jaunes et bleus, 1 432 émeraudes, des rubis, des perles fines grises, dont l’une d’une taille hors du commun. Ces fabuleuses pierres seront mises en scène à travers 149 dessins de bijoux qui ont été soigneusement gardés dans les archives de la maison. Claire Choisne, la directrice artistique de Boucheron, s’en est servi comme point de départ de sa nouvelle collection. Elle a réactualisé les proportions des joyaux et a choisi de créer des pièces toutes blanches à l’instar du plastron New Maharani. Celui-ci offre plusieurs portés (collerette, plastron, sautoir) jouant sur les différents rangs de perles de cristal de roche, de poires ou de gouttes, gravées et serties de brillants. Seule exception à ce conte monochrome, la parure New Maharajah et ses touches de vert grâce à de merveilleuses émeraudes comme celles de Colombie taille coussin en suspension sur des cabochons de cristal de roche pavés de diamants. Son motif central se décroche pour devenir une broche. La joaillerie dite blanche, à savoir monochrome car entièrement sertie ou pavée de diamants blancs sur métal blanc, est une des grandes tendances du moment illustrée par la collection Déferlante signée Chaumet. La source d’inspiration ? L’eau. C’est le mouvement de la vague et son énergie qui ont guidé le studio de création pour huit pièces exclusivement réalisées en diamants blancs. Le diadème est imaginé avec des centaines de gemmes tailles brillant, square, baguette et impératrice. La technique du ‘fil couteau”, chère à Chaumet, apporte légèreté et mouvement. Preuve en est avec le collier où les pierres précieuses semblent rouler à même la peau. L’œil est également attiré par une bague asymétrique dont les côtés, grâce à un ingénieux mécanisme, disparaissent pour laisser apparaître un diamant de 6,05 carats simplement monté sur un anneau. C’est dans un salon privé de sa boutique place Vendôme que Louis Vuitton dévoile Bravery II, le nouveau chapitre de la collection de Francesca Amfitheatrof. L’esthétique de la vingtaine de joyaux tourne autour de la création la plus célèbre de la marque : la malle. Son fermoir vient se poser sur le collier Multipin et sa tourmaline bleu lagon de
42,42 carats et sur le collier Magnétisme illuminé par un hallucinant saphir jaune taille coussin du Sri Lanka de plus de 20 carats entouré de diamants et suspendu à un double rang de tourmalines multicolores. Cornières et serrures composent un vocabulaire de formes carrées et rectangulaires repris notamment sur la chevalière Mini Malle épurée en apparence, mais complexe dans sa composition car le diamant taillé en fleur de Monogram au centre est entouré de diamants trapèze aux quatre coins, le tout ceint de baguettes. Un bijou plus que sublime !
Paris brille de mille carats
Cartier fait de nouveau appel à l’imagination et au ressenti presque surnaturel pour le nouvel opus haute joaillerie Sixième Sens. En témoigne le chapiteau de diamants baguette et de mini-pains d’émeraudes couronné d’un saphir de Ceylan de presque 8 carats sur la bague Heteractis. Autre création maîtresse : le collier Synesthésie. En platine, émeraudes – celle de centre en provenance de Colombie pèse 35,47 carats dont la transparence est mise en lumière par sa taille à degrés qui forme des rectangles à pans coupés –, turquoise et diamants, il surprend par les associations de couleur, ses pierres rondes et chaleureuses comme des bonbons, ses pampilles qui s’entrechoquent presque. Les artisans l’ont d’ailleurs “emmaillé” en son centre comme une dentelle entièrement articulée pour en préserver la souplesse, la mobilité et le confort au porté, tout en restant invisible. Le joaillier de la rue de la Paix a ressorti les photos de son collier Bérénice, un bijou d’épaule, exposé lors de l’Exposition internationale des arts décoratifs de 1925. Un siècle plus tard, il est baptisé Victorienne, constituée de vaguelettes de diamants et laque noire menant à une émeraude pain de sucre et deux diamants losanges, à porter en ras-de-cou ou couvrant le décolleté dans la largeur grâce à deux ajouts. Le jaspe noir surprend également sur un jonc aux accents rock’n’roll. L’atelier de glyptique, l’endroit où l’on sculpte les pierres, a travaillé deux ans sur cette matière puis y a piqué diamants triangulaires et clous d’or jaune avant de la sertir de deux quartz jaunes pains de sucre. Après les roses, Victoire de Castellane, directrice artistique de Dior Joaillerie, renoue avec ce qui fait battre le cœur de la maison, la couture, avec la collection Galons, ces rubans utilisés par Monsieur Dior pour orner le vêtement. Le résultat est d’une folle élégance. 81 bijoux sur lesquels les différentes tailles de pierre (ronde, carrée, ovale…) tracent des lignes de diamants ou de saphirs subtilement enchevêtrées. Ici, les formes sont libres, à l’instar de ces colliers asymétriques, déjà vendus souffle-t-on chez Dior, de ces bagues qui s’étalent sur deux doigts, de ces boucles qui grimpent sur l’oreille ou pendent à l’arrière du lobe. Lignes droites de brillants, zigzags de baguettes, quinconces de navettes, rangées de princesses, le tout monté sur de l’or jaune, blanc ou rose, donnent naissance à une bague et deux colliers. Et pour la première fois, à des pièces masculines dont des broches et des boutons de manchette. De pierres rares et exceptionnelles, il en est question chez Chopard.
Caroline Scheufele, coprésidente et directrice artistique de la maison, expose une pierre exceptionnelle non montée : une émeraude brute de 6 225 carats, originaire de Zambie et baptisée Insofu (éléphant en langue Bemba). Quelle en sera sa destinée ? Mystère, sans doute un ou plusieurs bijoux. Plus loin, une bague toi & moi associe deux diamants poire, un blanc et un bleu. Clou de la collection, le diamant “Rose de Caroline”, une pierre d’une nuance intense de plus de dix carats montée en bague, mise en valeur par une taille radiant de 70 facettes et un montage sur or certifié Fairmined où brillent deux rubis taille cœur. Ce n’est pas une mais deux collections que présente De Beers. D’abord, un aperçu de celle qui sera pleinement dévoilée en juillet prochain. Quant à la toute dernière collection de haute joaillerie baptisée The Alchemist of Light, composée de sept parures pour un total de 45 créations uniques, elle propose une interprétation créative d’un diamant à l’échelle moléculaire. Ces pièces font la part belle au serti clos et au diamant, la reine des pierres précieuses. Celui qui orne le centre d’un collier-plastron pèse 18,57 carats ! Plus loin une bague met en scène un diamant de plus de 11 carats d’une pureté qui frise l’exceptionnel. Ensuite, la parure Light Rays se fait beaucoup plus rock-chic-bohème. Réalisée en titane, elle joue avec les franges et les micro-articulations qui donnent vie à des diamants aux tonalités allant du jaune au noisette. Les pièces sont conçues pour multiplier les portés, comme ce collier qui se détache en deux éléments différents ou encore ces bagues spécialement dessinées pour se superposer parfaitement. Les perles sont, bien sûr, à l’honneur chez Tasaki, le joaillier japonais spécialisé dans ces trésors de la mer. Prabal Gurung, son directeur créatif, les fait pleuvoir entremêlées de saphirs bleus. Et imagine des cascades de perles Akoya sur les oreilles pour une paire de boucles surprenantes. Deux joailliers ont fait spécialement le déplacement à Paris pendant la Semaine de la haute couture. Lucia Silvestri, la directrice de la création de Bvlgari, a ainsi découvert le tout nouveau Bvlgari Hotel Paris et la majestueuse boutique de la place Vendôme.
Dans un des salons privés de celle-ci, elle présente elle-même plusieurs nouvelles pièces de la collection Magnifica richement empierrées dont un collier Serpenti en or rose, rubis et diamants ayant nécessité plus de 800 heures de travail. Sa particularité ? Deux reptiles sont associés pour la première fois sur un bijou Bvlgari ! Quant au joaillier Fawaz Gruozi, qui réside désormais à Londres où il a ouvert une boutique, il est aussi venu à Paris présenter ses trésors aux formes généreuses, mélangeant les couleurs intenses des pierres avec panache. Ses inédits et opulents joyaux sont dotés de cette légère touche anticonformiste qui le caractérise depuis ses débuts, à l’instar d’un jonc pavé de saphirs roses, de baguettes d’émeraudes et de deux rares saphirs ovales bleus du Sri Lanka dépassant les 150 carats, d’une bague conçue en spirale sertie d’un saphir bleu central taille coussin (27,33 carats), de saphirs taille baguette et d’émeraudes, ou encore de ce somptueux collier créé comme de la lave précieuse qui embrase le décolleté. Sur une coulée de diamants, quarante-quatre émeraudes zambiennes à l’appairage parfait viennent se poser comme par enchantement.