Interview

Iris, de l'univers à Paris

Depuis son sacre comme Miss Univers le 30 janvier et son installation à New York, couronne mondiale oblige, Iris Mittenaere n’était pas revenue en France. Pour son retour, le 17 mars dernier, Paris Capitale était là. Rencontre-portrait et séance photos à l’hôtel Marignan Champs-Élysées avec une femme que tous les hommes de la planète, y compris le Président François Hollande, rêvent d’approcher.

Iris, un prénom qui éclôt dans les journaux, fleurit sur toutes les lèvres et jaillit forcément dans les conversations. Durant un dîner, il suffit par exemple de prononcer négligemment la phrase : « Demain, je vais interviewer Miss Univers ! » pour qu’illico se multiplient les réactions. Hormis les extraterrestres qui ne voient pas de qui il s’agit, ignorent que la 65e lauréate du plus prestigieux des concours de beauté international est la Miss France 2016 Iris Mittenaere, tous les convives ont un avis sur ces concours, ce couronnement et la jeune lauréate. Ici : « Elle est magnifique, intelligente en plus, c’est une étudiante en chirurgie dentaire » ; là : « Oui elle a de l’allure, elle rapporte enfin ce trophée chez nous alors que la précédente gagnante hexagonale était Christiane Martel en 1953 » (une érudite) ; une autre fait la moue : « Quand même, c’est juste une miss, un truc pas féministe », tandis qu’un homme conteste cette vision passéiste en version cocorico : « Pour une fois qu’on gagne quelque chose et qu’on parle de la France en bien, moi je suis pour. » Bref, voilà un sacre décroché aux Philippines lors d’une cérémonie vue par des millions de personnes qui suscite les passions. Mais, au bout du compte, des étincelles dans les yeux, tous déclarent : « Tu nous diras comment elle est, hein ? Si elle est aussi belle et cool qu’on le prétend ? » Promis, juré, craché.

Le 17 mars, rendez-vous 17 h 15 à l’hôtel Marignan Champs-Élysées. J’observe la façade noire du 12 de la rue éponyme, je pousse l’une des…

 

(lourdes) portes et j’entre. Effervescence au sein du lobby. Dans le canapé rouge sinueux qui occupe le hall patientent déjà une équipe de télévision, une journaliste de presse télé, une correspondante étrangère, tandis que d’autres confrères arrivent ou sortent, perches, caméras et micros en attente “du” rendez-vous. Venue quelques jours à Paris, la reine de beauté, Lilloise de 24 ans, s’est vue concoctée un emploi du temps de ministre, que dis-je de reine… À tout le moins d’égérie et de symbole du charme à la française puisque le lendemain, c’est le président de la République qu’elle doit rencontrer. À planning débordant, retards stressants malgré une organisation efficace et millimétrée. Preuve, au moins, que la jeune femme a des choses à dire (coup de patte aux machos qui prétendent que les Miss, forcément potiches, n’ont rien à raconter). Attente. Encore attente. Enfin, SMS du responsable de la com’ en charge de cette journée où s’enchaînent les interviews : « Bonjour, je vous invite à monter en chambre 101 dans dix minutes. Désolé pour le retard. Christopher (Davin) ». Quasiment une heure. C’est la vie.

Dans la suite, cameramen, maquilleurs, stylistes, interviewers s’activent. Autour d’une jeune femme sur hauts talons, souriante, concentrée sans être tendue, habillée de blanc, l’incontournable écharpe Miss Univers la ceignant. Un coup de gloss, de poudre et celle qu’une pétition rêve de voir devenir notre nouvelle Marianne est à moi. Les minces quinze minutes accordées vont durer un tout petit peu plus. Belle évidemment, Iris l’est, mais elle est aussi et surtout souriante, chaleureuse, consciente de son rôle, attentive à l’autre, drôle, malgré les questions à coup sûr identiques débitées à la chaîne auxquelles elle répond depuis son arrivée. À croire que la plus grande vertu d’une miss est de se montrer aussi patiente qu’indulgente !

Évidemment, son existence a été bousculée depuis sa victoire du 30 janvier. « Je vis ces moments forts à 100 %. Même si, en revenant en France, j’étais stressée, me demandant comment on m’accueillerait, l’opinion au sujet des Miss étant souvent, disons, fluctuante. Finalement, tout le monde se montre extrêmement chaleureux. »

Évidemment, son quotidien ne ressemble plus à celui d’avant (la période des études dentaires dans le Nord-Pas-de-Calais) ni même à son année déjà bien remplie de Miss France ; et pour cause, elle vit à New York, doit participer à des « dîners, des charities, des séances photos », mais aussi passer son temps « dans les avions, les voyages ». Des moments pour elle ? « Oui, j’en ai heureusement : ils sont inscrits d’avance dans le planning qu’on me donne. Genre : ce soir, repas avec ma famille de 20 heures à 23 heures », rit-elle. S’agit-il de contraintes ? En rien, juste les obligations qu’impose le titre : « Ma nature est de prendre les choses avec plaisir, de les apprécier comme il le faut et au bon moment. » Et quand ce moment s’avère un hasard – elle s’est inscrite à son premier concours parce qu’il manquait des candidates sans imaginer la suite –, que faut-il en déduire ? « Que la vie est belle, qu’il convient d’en goûter chaque instant, que le destin tient à peu de choses. » Rien ne lui pèserait ? « Peut-être, un jour, cela arrivera-t-il. Mais faire plaisir aux gens, voir leurs sourires quand ils me découvrent ou les enfants avoir envie de m’embrasser, qui n’aimerait pas ? » Philosophe et instinctive, Mademoiselle Mittenaere savoure cette célébrité positive, les selfies comme les saluts, elle qui a vécu son élection sans penser remporter le titre. « J’avais une envie, mais une angoisse aussi, celle de réussir à franchir chacune des étapes. Les défilés en maillot, en tenue, mais aussi les différents jurys qui étudient votre parcours, interrogent vos goûts etc. On ne gagne pas un tel concours uniquement grâce au physique puisque toutes les concurrentes sont magnifiques, mais aussi par son attitude, son esprit, son comportement avec les candidates et l’équipe… Une miss Univers doit incarner des valeurs, être une belle personne dans tous les sens du terme. » Alors, quand le verdict tombe, il agit autant comme un soulagement qu’une déflagration. « D’un coup, on prend conscience de représenter plus que soi, que c’est la France qui se voit mondialement sacrée. Quelle fierté. »

Et la France justement ? Ce retour sous les flashs, le regard des autres forcément différents ? Être entourée, chouchoutée, fêtée, choyée sans prendre la grosse tête ni la perdre n’est pas forcément donné à tout le monde. Être déracinée non plus, même si toujours entrent en jeu une cause humanitaire et des conditions rêvées. Iris admet : « Bien sûr la France et Paris me manquent ; la gastronomie, les paysages, les parfums, l’ambiance… Alors, depuis que j’ai posé le pied sur son sol, je me transforme, avec ceux qui m’accompagnent, en guide. Là c’est tel monument, ici ce palais a été construit au XVIIIe siècle etc. Je ne cesse de leur faire tourner la tête. » Quand d’ordinaire c’est plutôt la sienne qui fait tourner celles des autres…

C’est la France qui se voit mondialement sacrée

Et de s’emballer pour le 17e arrondissement, où elle a vécu et qu’elle a apprécié pour son côté familial ; de parler du Moulin Rouge et du Lido auxquels elle a rendu hommage lors du concours en arborant plumes et tenues dignes des danseuses de ces célèbres cabarets – « C’est la représentation glamour de Paris, il fallait un symbole qui parle à tous… bien que porter ce chapeau emplumé et haut n’ait pas été facile » – ; d’évoquer le Marais dont elle apprécie les hôtels particuliers comme les bistrots ; de dévoiler que son resto fétiche chic est le Pré Catelan – « Wahou, voilà l’endroit où j’adorerais me marier un jour » – ; de confier qu’elle raffole des boutiques du Printemps. À ce sujet, des marques la font-elles craquer ? Oui : Jitrois pour la coupe et les matières, Jean Paul Gautier pour le style, Lacoste pour le casual, Christian Louboutin pour l’esprit parisien – « Quand, à l’étranger, on me dit “Elles sont incroyables vos chaussures”, je réponds toujours : C’est Louboutin, et français évidemment. »

Les quinze-vingt minutes sont passées. Si vite. Elle aurait peut-être aimé poursuivre l’entretien, mais déjà la porte s’ouvre et une confrère la veut pour elle. Salut, sourire. Un maquilleur se précipite. Raccord. Dernière question, notée à la volée : « Et après ? » « J’y pense, admet Iris. J’ai envie de tout essayer, peut-être la comédie et qu’on me dise si j’ai du talent ou pas, peut-être le mannequinat. L’important est de tester, de voir si je possède ou non un don et d’y réfléchir en conséquence. Je ne ferme pas les portes de l’avenir. En tout cas, là, je savoure l’instant. »

Moi aussi. Furtif, trop rapide, mais simple, plein de fraîcheur et de sincérité. Toutes les reines ne sont pas écrasées par le protocole même si celui-ci, la concernant, veille au grain. Et puis, avoir l’Univers à portée de mots, que demander de mieux ? Alors oui, comme j’avais « promis, juré, craché », je vous ai raconté.

Par Thierry Billard. Photos : Darius Salimi assisté de Frédéric Valézy, Matthieu Espinoza et Amélie Fong Chih Kai / Styliste : Mélanie Perego - Publié le

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