Lolita, à vous observer il semble y avoir une dualité en vous. D’un côté, une fille décidée et très exigeante, de l’autre, une jeune femme malicieuse qui ne demande qu’à rire…
Il faut garder une distance par rapport à tout ce qui existe autour du travail, comme la représentation, par exemple. Il faut préserver son sens de l’humour face à l’absurdité de ce métier.
Quel genre d’enfant étiez-vous ?
J’étais une petite fille très agitée qui se déguisait et se maquillait tout le temps, dotée d’une très forte aptitude au spectacle. J’éprouvais le besoin continuel d’attirer l’attention et vivais littéralement collée à mes parents. Il me fallait toujours être rassurée par eux. En fait, je crois que l’on devient acteur pour guérir un abandon jamais résolu et que monter sur scène est presque un appel au secours. Pourtant, j’étais à la fois très timide et sauvage. À l’adolescence, faire du théâtre m’a été très dur. Être sur scène était pour moi quelque chose d’une violence inimaginable. D’où ce rapport d’amour et de haine que j’entretiens avec ce métier…
Vous avez suivi votre scolarité à l’école italienne Leonardo de Vinci de Paris…
Où les cours se faisaient exclusivement en italien ! Mon père (à la fois producteur et restaurateur de films anciens) est d’origine milanaise et l’italien est un point identitaire chez moi. Je me sens profondément italienne. Que ce soit dans mon rapport aux enfants ou dans la façon d’exprimer ce que je ressens. J’ai d’ailleurs un agent en Italie.
Peut-on avoir une enfance normale lorsqu’on est la fille d’une icône du cinéma français ?
Je n’ai pas été élevée dans la culture du : « Il y a les gens connus et les autres. » À la maison, il n’y avait aucune fascination pour la célébrité et ma mère considérait que son métier ne valait pas mieux qu’un autre, que le monde du cinéma ne se plaçait pas au-dessus de tous les autres. En même temps, enfant, je vivais mal sa célébrité. C’était très violent et je passais mon temps à vivre dans la peur du regard des autres. Par la suite, j’ai réalisé combien cette place à prendre était effrayante mais qu’il me fallait me libérer de cette angoisse si je voulais vivre
Vous n’avez que 15 ans lorsque la réalisatrice Laurence Barbosa vous repère dans l’appartement familial et vous engage dans La Vie moderne où votre maman doit tenir le rôle principal…
J’étais en seconde et Laurence a flashé sur moi dans la cuisine ! Dans ce film, ma mère et moi n’avons fait que nous croiser car nous n’avions aucune scène ensemble.
La tête bien faite que vous êtes a poursuivi ses études : hypokhâgne, khâgne, le TNS (École supérieure du théâtre national de Strasbourg)…
Que j’ai interrompu en cours d’études car je travaillais déjà ! Avoir une mère comme la mienne, même si je me suis toujours très bien entendue avec elle, c’est écrasant. Quand un enfant “de” choisit de faire ce métier, il se demande toujours quelle légitimité est la sienne. Les gens, outre le fait de rechercher en nous la ressemblance physique, ne vont-ils pas nous comparer à notre parent célèbre ? Ne jouerons-nous pas forcément moins bien ? Moi, je ressens toujours un besoin de reconnaissance. Ce métier est un trajet.
Vos parents vous ont-ils encouragée dans cette voie ?
Ni encouragée ni découragée. Aujourd’hui, ils sont infiniment heureux pour moi.