C’est à Catherine Chevillot que revient le privilège de diriger ce musée de renommée internationale, bijou de la culture française, lieu de manifestation du luxe. Un musée riche de près de 7 000 sculptures, 8 000 dessins et 7 000 objets d’art accumulés au cours des vingt dernières années de la vie du “père de la sculpture moderne”. Pendant les trois ans de travaux, les 16 millions d’euros nécessaires à ce projet ont été financés à 49% par le ministère de la Culture et 51% par le musée Rodin soutenu par la fondation Iris & B. Gerald Cantor. « La sculpture, l’affirmation de sa réalité comme poésie, de son histoire comme de sa modernité, ont donc guidé tous les choix lors de la rénovation : respect du lien de Rodin à cette architecture telle qu’il l’a connue et occupée, de l’interaction entre le jardin et les salles; jeu de la lumière naturelle; discrétion du dispositif muséographique, parcours simple alliant le chronologique et le thématique, qui se prolonge dans la lumière paisible du jardin », explique la directrice du musée.
En effet, la spécialiste a tout compris : répondre aux désirs de l’artiste… au rêve secrètement caressé tout au long de sa vie de créer son propre musée réalisé en 1916, donnant à l’État la totalité de ses collections pour sauver l’hôtel Biron de la démolition. Il n’en verra toutefois jamais l’accomplissement, décédant deux ans avant son ouverture, le 4 août 1919. Ainsi, respectueux de sa mémoire, de sa présence toujours si forte, le visiteur peut l’imaginer caressant si délicatement sur le papier ses nus érotiques dans le salon ovale donnant sur le jardin, l’œil posé sur le modèle entouré de ses accumulations de meubles, d’objets et d’antiques. Ici encore des vases grecs ou chinois. Plus loin un brûle-parfum japonais. Rodin est là. Dans la lumière paisible, il se bat pourtant avec la matière, il monte et démonte les pièces, les articule sans limite, les photographie et les recompose. Camille Claudel, son élève et sa muse, amoureuse passionnée pendant presque quinze ans, laisse ses traces, avec des œuvres remarquables.
Rénover en gardant l’âme du lieu. Tel est donc le résultat magique de cette restauration. De l’extérieur presque rien n’a changé. Le bâtiment comme les garde-corps restent dans leur jus. À l’intérieur ? L’une des plus belles scénographies du moment. Cohérente. Lisible. Raffinée. Le parcours ? Une déambulation continue et fluide. Les pièces baignées par la lumière naturelle conservent l’enfilade originelle. Les miroirs avec leurs reflets tout comme les boiseries, les vitres des fenêtres rénovée avec la technique du verre coulé et le parquet Versailles totalement reconduits à l’identique préservent l’ambiance chaleureuse et intime, ancienne et rare, de cette demeure privée. De nouvelles salles se concentrent l’une sur le mobilier de l’artiste, recréant un espace de réception, l’autre sur son amour pour l’antique qui nourrit sa notion de la sculpture partielle, avec cent vingt-trois œuvres, sorties tout droit des réserves, entourant le célèbre Homme qui marche. Ailleurs encore, regardez la superbe présentation de plâtres, de terres cuites, de maquettes préparatoires ou d’assemblages mise en regard des marbres, permettant l’appréhension des techniques, du processus créatif et de l’univers de Rodin. Enfin, une cinquantaine d’œuvres issues de sa propre collection de ses amis peintres trouvent leur place au musée comme Le père Tanguy de Van Gogh en qui l’artiste voyait « un admirable démolisseur des formules académiques ». Autre perle, la galerie d’art graphique, où se multiplieront les expositions sur les dessins, photographies et gravures, qui illumine l’esthétique du maître de La porte de l’Enfer sur laquelle il travailla trente ans.
L’hôtel Biron ? Un lieu, un homme, une œuvre. Les murs dans lesquels naquit la sculpture moderne. Et sur laquelle le visiteur peut encore rêver dans le jardin peuplé de trente bronzes monumentaux comme les Bourgeois de Calais ou Le Penseur. Une demeure jusqu’à alors très prisée et qui devrait le devenir encore plus ! Rodin ? Toujours révolutionnaire.
De 10h à 17h45, mercredi 20h45
Fermé lundi – 10 €