L’Hôtel Paradiso fait son cinéma

C’est d’ailleurs tout l’esprit et l’enjeu de cet hôtel, surnommé Hôtel Cinéma, puisqu’il a été construit au dessus du mk2 Nation: « C’était la dernière salle de notre réseau qui n’avait pas encore été rénovée. On s’est alors posé la question sur ce qu’on pouvait bâtir pour financer les travaux », raconte Nathanaël Karmitz avant de poursuivre : « On est arrivé à la conclusion qu’il fallait dédier la rénovation au 7e Art, et travailler autour du concept ‘Paradiso’ ». Un concept que les frères Karmitz développent depuis une dizaine d’années, et qui a vu naître des événements hybrides de grande ampleur, à l’image de Cinéma Paradiso au Grand Palais, qui mêle films et gastronomie. Avec cet hôtel, le projet est poussé à son paroxysme. Quand on loue une chambre, un ticket de cinéma est offert à chaque client, qui peut avoir un accès privé au cinéma mk2 de 22 heures à 6 heures du matin: « Si vous voulez descendre en pyjama vous faire une toile, c’est possible! », suggère Elisha Karmitz. S’il faut encore attendre l’ouverture des salles obscures pour succomber à ce plaisir tentant, la présence d’un hôtel dédié à un art, dont la crise sanitaire a privé la société depuis plusieurs mois, tombe à pic.

Pourtant, le projet est sur les rails depuis sept ans, bien avant la pandémie. Après avoir retardé la date, les deux frères ont finalement décidé d’ouvrir le 10 mars dernier, pour une clientèle majoritairement parisienne : « Avec la crise, l’hôtellerie évolue vers le “staycation”, les gens veulent sortir de chez eux et vivre une expérience, dans leur ville », analyse Elisha Karmitz. C’est sans doute la raison pour laquelle les prix sont relativement abordables. Comptez 100 € la nuit pour une chambre classique, et à partir de 350 € pour la Grande Suite Cinéma. Un tarif attractif, qui reste dans la veine du mk2 qui prône l’accessibilité et l’intimité dans un quartier qui bouge, dans l’Est parisien. Dans ce sillage, les frères Karmitz se sont entourés d’amis artistes. Woodkid a élaboré l’ambiance sonore, JR a créé deux immenses fresques dans la cour: l’une sur le Kid de Chaplin, l’autre sur Harold Lloyd dans le film Monte là-dessus. Quant à Marc Grossman, le pape de la street food new-yorkaise healthy, il a signé la carte du futur restaurant, qui comptera vingt-huit tables, une terrasse, et un rooftop, avec une vue sur tout Paris. Enfin, dans le hall du mk2 rénové, on peut lire une inscription en néon de l’artiste Christian Boltanski, qui résume sans doute le mieux l’essence de ce lieu: “Cinéma, Art et Vie”